Dimanche, 25 Novembre 2012 11:10

gifle-femme-tunisieC’est samedi. Il fait un temps splendide, vers 14h, à El Menzah, dans l’un de ces quartiers résidentiels, pas loin de Cité Jamil. Un bruit de claquement sec retentit, bientôt suivi d’un autre. Un jeune homme, très BCBG, âgé d’une vingtaine d’années, vient de donner une paire de claques, deux gifles retentissantes sur le visage de sa compagne.

Elle éclate en sanglots, se tient le visage des deux mains. Elle porte un petit pull blanc cassé, les cheveux remontés en chignon, et un jean qui la serre de très près. Le jeune homme l’attire vers lui, la tire par sa main. Elle obtempère rapidement.

Il l’enlace, et elle le suit en silence, sous les regards des passants. Pas un cri, pas un geste de trop, pas une protestation qui auraient permis de justifier une intervention. Elle finit par suivre docilement son fiancé, son ami, ou son petit-copain. Après avoir reçu deux claques en pleine rue. Une scène de violence d’une triste banalité, au sein d’un jeune couple, dans un quartier plutôt chic, au cœur de Tunis.

Il ne s’agit ici manifestement pas d’adeptes d’un discours pseudo-religieux. La femme ne portait ni hijeb, ni niqab. Une violence banale, qui ne tire  aucunement sa justification de l’idéologie salafiste montée en épingle, ces temps-ci. Encore moins de motivations sociales, que l’on attribue trop facilement aux couches défavorisées. Nous sommes à El Menzah 6, et non à Hay Ettadhamen. Et les vêtements de ces jeunes gens, leur allure soignée, sont autant d’indices d’appartenance à la couche supérieure de la classe moyenne citadine. Et la scène à laquelle on a assisté n’est même pas surprenante. Un animateur télé, a même cru bon récemment de conseiller à un mari violent  de gifler sa femme plutôt que de la frapper du poing

En octobre dernier, l’Office national de la Famille et de la Population (ONFP) révélait des chiffres plutôt troublants, résultants d’une enquête sur la violence à  l’égard des femmes, au cours de laquelle un échantillon de 3873 individus de sexe féminin, âgés entre 18 et 64 ans, ont été interrogés en 2010. Ainsi, il apparait que la moitié des femmes de Tunisie, plus précisément 47% d’entre elles, sont victimes de «violence physique». Des termes génériques qui regroupent indifféremment des coups de poings ou de pieds, des brûlures, des étranglements. Ou encore une gifle, comme celle à laquelle on a assisté le samedi 24 novembre, soit la veille de ce dimanche, proclamé «journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes».

Un spectacle d’autant plus désolant, qu’il est appelé à perdurer. Puisque selon l’avocate Nedra Hadiji, présidente de l'association "Tounes Amenaty", «la violence contre les femmes a pris de l'ampleur après la Révolution».

Soufia Ben Achour

Femmes de Tunisie : Gifles de la bourgeoisie
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