Lundi, 14 Janvier 2013 16:13

revolution-tunisieEn ce 14 janvier où on commémore le deuxième anniversaire de la Révolution, il est désormais de bon ton d’afficher son pessimisme en bandoulière. Et il y a effectivement matière à broyer du noir: la dégringolade du pouvoir d’achat, le recyclage des corrompus qui continuent à pavoiser, les régions qui s’enfoncent toujours plus dans le marasme et la marginalité. Pis : le front uni des Tunisiens face à la dictature a volé en éclats.

Pendant ce temps, les partis politiques dirigés essentiellement par les gladiateurs de l’ancienne génération ont du mal à remplir leur mandat dans une configuration désormais beaucoup plus complexe. Et le rendement de l’Assemblée Nationale Constituante révèlera peu à peu l’étendue des dégâts occasionnés par des recrutements de dernière minute pour le moins approximatifs. C’est ainsi que l’on retrouve aujourd’hui dans l’hémicycle du Bardo, des hommes et des femmes qui n’ont trop souvent aucune culture politique,  aucune vision leur permettant d’assumer une mission d’une importance cruciale.

Une erreur dramatique à imputer à de vieux leaders dépassés par les événements, et qui n’ont pas pris la mesure de leurs responsabilités historiques en faisant passer l’allégeance avant la compétence, les questions identitaires avant le développement et l’égalité. Et voici qu’ils font payer aujourd’hui les frais de leur propre incurie à tous les Tunisiens. La situation est donc difficile.

Faut-il pour autant réduire la Tunisie, en ce 14 janvier 2013, à ce schéma ? Clairement non.

Aujourd’hui, les médias ne craignent plus de viser le cœur du pouvoir. Mieux : les membres du gouvernement, le président sont devenus des cibles privilégiés, une source d’inspiration pour les humoristes et les caricaturistes. Les médias dominants se font même un plaisir de critiquer, et même de ridiculiser, ministres et présidents.

La police qui avait tous les droits, tous les pouvoirs, se fait malmener, vilipender, et même si les services de sécurité font encore usage dans certains cas de leur vieille panoplie de sévices, les citoyens font front, s’opposent, s’organisent, portent plainte, contre ceux qui constituaient le bras armé de la dictature. «Plus jamais peur» s’est donc avéré être bien plus qu’un simple slogan.

Pour la première fois dans l’histoire de la Tunisie, le grand capital n’accorde plus systématiquement son appui au parti politique au pouvoir. Certains tentent de s’attirer ses grâces, d’autres se placent délibérément dans le camp opposé. Le monde des affaires n’est plus le monopole d’une seule couleur politique. Et même la corruption, l’argent douteux injecté dans l’interlope microcosme politico-médiatique n’a plus la même et unique odeur.

Une nouvelle génération d’artistes, d’intellectuels, et même d’hommes et de femmes politiques émerge peu à peu. Blogueurs et journalistes citoyens font exploser le ronronnement des journalistes blanchis sous le harnais de Ben Ali. Ce n’est pas par hasard que les affaires les plus explosives aient été révélées par de jeunes reporters quasiment inconnus sous la dictature. Et il n’est pas fortuit que les regrets les plus ostensibles soient exprimés par ceux qui ont le plus profité des largesses sélectives du benalisme.

Deux ans après la fuite du dictateur, la société civile tunisienne est en ébullition. La vie associative est florissante. Les intellectuels publient à tour de bras tribunes, textes au vitriol, analyses, créant une dynamique que la Tunisie n’a peut-être même pas connu à l’aube de l’Indépendance. Autant d’hirondelles annonciatrices du véritable Printemps encore à venir, mais dont les premières fleurs éclosent déjà dans la discrétion, et le brouhaha de la confusion. Et rien que pour cela, Vive la Révolution.

Oualid Chine

Tunisie : Rien que pour cela, Vive la Révolution !
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