Fausses notes présidentielles
Lundi, 02 Janvier 2012 00:21

palais-carthageLes discours de Moncef Marzouki n’ont pas fini de susciter la polémique, jusqu'à enflammer l'opinion dans la soirée du réveillon. Dès son investiture, le président de la République a provoqué une avalanche de commentaires, avec le fameux «safirat» du 13 décembre, perçu comme insultant par de nombreux Tunisiennes et Tunisiens.

Le mot n’a certes rien de péjoratif au niveau strictement linguistique. Sauf qu’un  discours doit tenir compte de la perception de la population à qui il est adressé. Et à cet égard, ce choix n’était pas vraiment une réussite.

Et voici qu’à l’occasion du nouvel an, le président se permet, dans une allocution prononcée le 31 décembre, de rappeler toutes les «qualités» attribuées au peuple qu’il dirige. Avec en vrac la lâcheté, la couardise, et autant de qualificatifs peu glorieux qui étaient donc, selon notre président, accolés au Tunisien. Certes, Marzouki s’empressera de préciser, juste après, que ces vilains défauts ont été démentis par la suite des événements, et par la Révolution. Mais valait-il vraiment la peine de les aligner à l’occasion des souhaits du Nouvel An ? C’est à se demander pourquoi notre président a estimé bon de rappeler tout le «bien» que pensent de nous les «jaloux». Certains auront même jugé insultant ce rappel pas très «à propos». Mais après tout, fêter le nouvel an «n’est pas dans les traditions tunisiennes» rappellera Marzouki, peut-être pour faire plaisir à certains amis, ceux-là même qui ont dû jubiler avec le coup des «safirat». Passons.

moncef marzoukiLe président des Tunisiens, en un geste pour le moins inattendu, a voulu s’adresser aux Français, toujours pour l’occasion du Nouvel An, profitant d’une tribune offerte par Mediapart. Et en guise de vœux de bonne année, le président Marzouki appellera les Français à ne pas accorder de crédit à la théorie apocalyptique des Mayas, selon laquelle la fin du monde est prévue pour 2012. Déjà que les habitants de l’Hexagone n’ont pas vraiment l’habitude qu’un président étranger choisisse de les interpeler via le web, Moncef Marzouki poussera l’originalité au point d’évoquer une antique mythologie sud-américaine. Guère dans nos traditions non plus, mais après tout, bien dans la ligne humaniste et universaliste de notre président qui critiquera, au passage, la dérive islamophobe de nos amis français.

Et Moncef Marzouki multiplie les discours. Une volonté bienvenue de s’adresser au peuple, et pourquoi pas, de le rassurer, alors que les indicateurs économiques et sociaux sont au rouge. Sauf qu’à ce stade, avec tous ces couacs et autres fausses notes retentissantes, les discours présidentiels risquent d’avoir un effet contreproductif. Et si Moncef Marzouki lui-même avoue que ses mots dépassent (trop) souvent sa pensée, on peut, à bon droit, s’interroger sur la portée de ses (nombreuses) allocutions. Pècheraient-elles par une excessive improvisation ? Ou par une oreille trop attentive accordée à un Henri Guaino tunisien, un conseiller bien de chez nous, mais tout aussi inspiré que le nègre de Sarkozy ?

Moez El Kahlaoui

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