«Le clientélisme, le népotisme, le non respect des règles démocratiques, l’absence de la mouhassaba, et l’inexistence de structures élues. C’est ce qui nous a incité à opter pour la rupture, et la fondation d’un nouveau parti». C’est ce qu’a déclaré Abderraouf Ayadi, ex-secrétaire général du Congrès pour la République, et leader d’une nouvelle formation politique, lors d’une conférence tenue le mercredi 9 mai à l’Ariana.
Une déclaration qui intervient après des mois de lutte intestine, d’escarmouches verbales, et d’attaques médiatiques. «L’utilisation de la force, à Gabès, pour empêcher le déroulement d’une réunion politique, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Il s’agit de méthodes dignes de l’ancien régime» accuse Maître Ayadi. Il dressera un tableau plutôt sombre de la Tunisie d’après la Révolution.
«Le peuple tunisien a le droit de connaître la vérité, toute la vérité. On doit dévoiler les dessous des relations du système Ben Ali avec Israël. Alors que les dossiers sur ce sujet ont été escamotés» dira-t-il, avant de s’interroger : «comment des symboles de l’ancien régime éjectés à coups de Dégage, peuvent-ils être appelés à rejoindre leur poste, à l’administration» ? En une allusion aux violences policières du 9 avril, Ayadi affirmera : «Le droit à manifester est un acquis de la Révolution. Un droit que l’on ne peut remettre en cause».
A la tribune, le leader des dissidents du CPR était encadré par l’historien Amira Alaya Sghayer, à sa droite, et à sa gauche, le député Azad Badi. Fethi Jerbi, membre du bureau politique et de la faction Ayadi a brillé par son absence, malgré l’insistance des membres du groupe, qui disent avoir tout fait pour qu’il participe à la conférence. Selon les témoignages recueillis sur place, l’homme aurait bien du mal à quitter une organisation qu’il a contribué à bâtir. Il aurait ainsi préféré batailler jusqu’au bout pour maintenir son unité. Alors qu’il est notoire que M. Jerbi fait l’objet des critiques les plus virulentes du groupe adverse. Mais la plupart des personnes présentes se diront cependant «soulagées» par cette rupture, après de longs mois de tension.
En définitive, la faction Ayadi, qui a souvent reproché à ses adversaires au sein du même parti de menées putschistes, finira par faire sa Révolution. Onze députés élus sur les listes du CPR ont ainsi fini par claquer la porte. Il s’agit d’Abdelaziz Kotti, Mohamed Ali Mnasri, Azed Badi, Arbi Abid, Naceur Brahmi, Mohamed Karray Jerbi, Abderraouf Ayadi, Rafik Tlili, Dhamir Mannai, Nizar Makhloufi, et Rabii Abdi. Et des alliances avec des groupes parlementaires dissidents de formations comme le Parti Démocratique Progressiste, Ettakatol, sont au programme. Ce qui pourrait contribuer à redistribuer les cartes au sein de l’Assemblée Constituante.
Mais quel nom portera donc le nouveau parti né de la scission avec le CPR ? Pour Ayadi, «C’est aux militants d’en décider. La base doit avoir son mot à dire sur la question, dans le cadre de la démocratie participative, à laquelle nous croyons». A cet égard, sur les réseaux sociaux, les dissidents du CPR s’activent déjà pour trouver une nouvelle dénomination. Abderraouf Ayadi soulignera : «Il s’agit aujourd’hui et avant tout de bâtir un nouveau parti, pour constituer une école politique, au service de la Tunisie. Pour former de nouvelles forces vives, au bénéfice de la patrie».
L.B.C