Mercredi, 15 Août 2012 18:30

ennahdha-conspirationTribune. Y aurait-il un complot médiatique destiné à décrédibiliser la Troïka en général, et Ennahdha en particulier ? C’est en tout cas la thèse que défend ce texte, envoyé par l’un de nos lecteurs. Selon lui, une véritable guerre est menée par les adversaires du gouvernement sur le terrain médiatique. Voici ses arguments.

«Ils sortent les bébés des couveuses et les tuent». Cette déclaration faite  par la fille de l’ambassadeur koweitien aux Etats-Unis avant la guerre du Golfe a, entre autres, permis à Washington de légitimer sa guerre en Irak aux yeux de l’opinion publique mondiale. Maintenant, il est connu, que c’est la CIA, qui au travers du cabinet de communication américain Sonderhill qui avait été l’instigatrice de cette manipulation. Les soldats irakiens n’ont bien évidemment jamais perpétré de tels actes même si beaucoup le pensent encore aujourd’hui.

Le cas de la guerre du Golfe
Suite aux expériences réussies de manipulation de grande envergure faites avant la guerre d’Irak (histoire des couveuses, mais aussi des armes chimiques avec les fausses images satellites montrées à l’ONU par Colin Powel), le gouvernement américain a décidé la création d’un département doté d’un budget annuel de 800 millions dollars afin «d’organiser à grande échelle des opérations de manipulation des opinions publiques et d’attaquer informationnellement  les adversaires politiques» (tiré du DoD 13 000 ACT présenté et voté au congrès américain en 2003 et que le New York Times a révélé à l’occasion du scandale de l’affaire des journalistes de la CIA qui écrivaient dans les journaux irakiens pour valoriser l’image de  l’armée américaine – nous y reviendrons plus bas).

La victime Chirac
La première victime de cette officine, le bureau des opérations informationnelles, fut paradoxalement le président d’un pays  allié.  Jacques Chirac qui s’était fermement opposé à la guerre en Irak va en payer le prix. Entre février 2003 et juin 2004, une formidable campagne de déstabilisation est orchestrée. Plusieurs journalistes français se lancent dans des diatribes contre le président français et sa gestion économique du pays. Deux livres incendiaires sont publiés. Des sites internet fleurissent dénonçant « les affaires » de Jack (vielles affaires des emplois fictifs à la mairie de Paris, affaires de détournement d’argent, de comptes au Japon, de voyages touristiques payés en espèces – 2000000 d’euros dit on, etc.).

Les services français mis sur l’affaire sont au départ désorientés. Ils   ne parviennent pas au départ à imaginer qu’une véritable guerre informationnelle reposant sur un concept organisé ait été mis en place. Au mieux, ils y voient une succession d’attaques faites par des acteurs médiatiques différents.

Cette analyse est une erreur  qui les empêchera de réagir rapidement. Seule l’interception d’un échange de mails entre un journaliste français et une association pour la liberté financée par les Etats-Unis leur permettra de saisir la dimension de l’attaque qui sera subitement arrêtée après de vifs mais discrets échanges diplomatiques et la participation de la France au conflit afghan…..

Le schéma des attaques en Tunisie
La guerre de l’information n’est pas un concept, une hypothèse ou une idée mais une technique rodée comme celle de la guerre aérienne ou terrestre. Elle repose sur trois piliers précis bien conceptualisés. Un schéma auto réalisateur, le web 2.0 , l’absence déclarée d’attaquant (en apparence). Le but ultime est le discrédit de l’image de l’adversaire ce qui entraînera sa disparition politique ou sociale en raison de l’abandon du soutien de l’opinion publique.

grenade-infoLe schéma auto-réalisateur de l’attaque : pour comprendre une attaque informationnelle, il faut comprendre le cheminement de l’information. Au départ, une source informationnelle (site internet ou le plus souvent journaliste acheté) diffuse une information crédible. Cette crédibilité lui est donnée car elle est en partie vraie. L’exemple récent que l’on peut prendre en Tunisie et celui du bacille du choléra trouvé à Rades. Bien que ce soit grave,  cette information dite uniquement de cette façon constitue un acte de désinformation. Pour être complète, l’information aurait dû mentionner quel type de bacille a été trouvé (il en plus d’une centaine plus ou moins dangereux) et surtout expliquer que le choléra n’a pas tué en Tunisie depuis au moins 30 ans. L’information diffusée est ensuite reprise par d’autres médias et relais d’information et largement diffusées sans vérification ni précisions.  Comme dans le web2.0 chaque récepteur est aussi une source en raison de l’interconnexion avec les flux rss, les réseaux sociaux (facebook, etc.…), l’information ou plutôt la désinformation se propage rapidement. En bout de chaîne, il devient pratiquement impossible de revenir sur la véracité de l’information car chaque relais ne peut contredire la source où il a pris l’information. Ce phénomène est d’autant plus vrai dans les pays, comme la Tunisie, ou les journalistes, fautes de moyens pour faire des enquêtes sur le terrain, se nourrissent des journaux électroniques et n’ont pas toujours les moyens de vérifier. Très vite, vu la rapidité d’internet, en bout de chaîne, le public destinataire de l’information croient cette information en raison du nombre important et diversifié de sources qui la diffuse.

La force des attaques informationnelles reposent sur leur caractère en apparence désorganisé. L’idée étant de faire croire que l’information est neutre et qu’elle n’émane pas d’une source ennemi. Dans ce cas, la cible ne peut se défendre car elle ne connaît pas son adversaire. La connaissance est d’autant plus difficile que les relais sont souvent des journalistes expérimentés mais corrompus voir des journalistes étrangers. Des journalistes rémunérés par la CIA écrivaient ainsi des articles pour qu’ils soient diffusés dans une dizaine de journaux irakiens. Objectif : critiquer la guérilla des résistants irakiens et légitimer le travail des soldats américains.

L’opinion publique est toujours l’enjeu d’une guerre médiatique. Les informations véhiculées sont soigneusement choisies pour jouer sur le caractère émotionnel de la population. Les exemples concernant les cas du choléra ou de peste des petits ruminants le démontrent. Le but étant d’entraîner la population dans un cycle de peur/réaction politique ou dans la rue vis-à-vis de l’autorité incompétente / réaction des autorités/…. Une escalade continue jusqu’à parvenir à ôter toute crédibilité à l’autorité politique.

Ennahda est actuellement la cible d’une puissante opération de déstabilisation par l’information. La création d’un site en ligne comme Ennahda Info en est un indice. Ce type de sites ont ainsi été mis en œuvre par certaines officines pour s’en prendre à Hugo Chavez. Et aujourd’hui, le site Iranwatch qui attaque l’Iran sur internet est animé par ceux-là même qui étaient derrière le site Irakwatch. Et l’ombre de la CIA plane sur l’un comme sur l’autre.

A l’issue de la Guerre du Vietnam, le général Lewis déclarera «nous n’avons pas perdu la guerre militairement mais nous l’avons perdu sur le terrain informationnel ». Dans ce contexte, même l’amélioration des politiques économiques et sociales ne servira pas nécessairement Ennahda. En tous cas, pas tant que ce parti n’aura pas saisi que ce qui se passe sur le terrain des médias ne résulte pas  de critiques dispersées de différents journaliste mais plutôt d’une action organisée en amont.Le cas échéant, la Troïka aura beau se démener sur le terrain, cela ne servira pas nécessairement sa cause. Car le champ de bataille est aussi celui de l’information.

Mehdi Gallak

Tunisie : Complot médiatique contre Ennahdha ?
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