Mercredi, 20 Mai 2015 13:31

Tribune. L'état profond est un signe dangereux de décadence sociale et politique qui risque de balayer le petit rayon de démocratie qu'a pu apercevoir la Tunisie d'après  révolution. Par Abdel Jaoued Bouslimi

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Les mots ont un sens et le sens devient commun quand il est propagé par des médias puissants. La création de concepts ambivalents est devenue un produit de consommation dangereux pour la population Tunisienne. La révolution, ou ce qu'il en reste, souffre aujourd'hui de la confusion de ces concepts et ne peut maintenir le cap du changement qu'à travers une remise en question des sens accordés aux mots. Souvent déformés pour atteindre des buts inavoués, les notions telles que djihadisme, terrorisme ou prestige sont utilisées pour occuper un paysage médiatique superficiel et conspirateur. Un vrai problème de linguistique qui fait du tunisien une proie facile, surtout quand ses propres médias internes font tout simplement le relais du sens que l'occident veut donner à ces notions. Le prestige de l'état dont on nous a tellement abreuvé pendant les élections s'avère être aujourd'hui une coquille vide car personne ne pense à respecter le droit ni ses adversaires politiques et va même plus loin en déformant leurs propos pour ternir leur image et les présenter comme des bourreaux. Ceci devient dangereux quant le Tunisien Lambda ne comprend plus qui tire les ficelles et même quand il le sait il n'ose pas dénoncer ces actes de détournement de l'opinion publique au profit d'une mafia agissant en catimini. C'est l'Omerta, la loi du silence qui s'installe dans un pays réputé être bavard de nature.

Un député menacé par ceux la même censés le protéger, un ministère qui ne contrôle plus ses subordonnés et la liste est longue. L'état profond est un signe dangereux de décadence sociale et politique qui risque de balayer le petit rayon de démocratie qu'a pu apercevoir la Tunisie d'après  révolution. Tout le monde se rappelle des nébuleuses Allemandes ou Italiennes qui assassinaient sans gène un Aldo moro ou un chef d'entreprise gênant. Si l'état profond se soucie de son prestige c'est parce qu'on lui a préparé le terrain, si la justice ne lève plus le petit doigt pour intervenir c'est parce qu'il ya une peur de l'inconnu qui trahit l'action et fige le courage des juges.

Le pire des terrorismes c'est celui qu'on inflige à soi même: la peur de certains néo politiques Tunisiens de voir leur sort confondu avec celui de l'Egypte a contaminé une grande partie des honnêtes gens dans la magistrature pour fermer les yeux sur l'état profond et laisser prospérer une société de non droit qui aboutit forcément à une dictature sans foi ni loi.  

            Beaucoup de partis politiques  revendiquent aujourd'hui cette notion de prestige d’état ou de souveraineté, mais personne ne parvient à les définir,  à leur donner un sens compréhensible par tous les Tunisiens. En effet, cette notion de prestige cache une vision répressive du pouvoir et devient un danger quand les lobbys mafieux s'y attachent pour reprendre le pouvoir. Elle devient alors un excellent  mécanisme de répression, d’autoritarisme et d’endoctrinement du peuple.

            A mon sens, un état ne peut être prestigieux  que s’il  fait de l'homme son premier objectif de respect et de développement sans peur ni hypocrisie. Cet Etat ne sera prestigieux que s’il considère que la Tunisie est une entité sans frontières régionales réelles ni imaginaires. Si la citoyenneté devient pour lui un objectif au dessus des clivages idéologiques et partisans. En fin "le prestige de l'état profond" risque de nous plomber et nous renvoyer  aux calendres grecs si on ne purge pas nos fantasmes de pouvoir absolu et si on ne remet pas en question le sens qu'on donne facilement à des mots sans consistance. Pour preuve de l'autoritarisme et de l'ambigüité que cache le mot "prestige" rappelons nous de la fameuse phrase de Charles de Gaule: "L’autorité ne va pas sans prestige, ni le prestige sans éloignement."

 

Tunisie: Prestige de l'Etat Profond
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